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28 novembre 2014

Fille de la campagne

 

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Traduction : Pierre-Emmanuel Dauzat

Ce bouquin a atterri dans ma pile par malentendu en quelque sorte : je pensais acheter le fameux Les  Filles de la campagne qui a rendu Edna O'Brien célèbre. Je me suis trompée, à un singulier (et un article) près. Mais à l'heure où les Irlandaises se battent pour le droit à l'avortement, ce livre tombe à pic pour en savoir plus sur la condition féminine de l'île verte.

Edna O'Brien, née en 1932, revient en effet ici sur sa vie (ce sont ses mémoires). Des études de pharmacie (première surprise !) qu'elle a suivies sans vraiment avoir le choix puisque c'était celui de ses parents. Néanmoins elle était déjà "convaincue qu'un jour [elle] rencontrerai[t] des poètes et qu'un jour [elle] serai[t] admise dans le monde des lettres". Des parents rigoristes et pas vraiment nets (mère névrosée, père violent)  qui l'envoient en pension où elle vit cette période comme une incarcération. Cela la poussera à obtenir son examen avec un an d'avance et dans une relation étrange avec une jeune religieuse, avant que celle-ci disparaisse mystérieusement du couvent (on imagine pourquoi). Sa rencontre avec l'écrivain tchèque Ernest Gléber, qu'elle épouse contre l'avis de ses parents. Une fuite en avant pour échapper à l'univers familial étouffant  (elle pense que ses parents vont vouloir l'enfermer suite à sa grossesse hors mariage, et le mariage contre leur avis) et un pays schizophrène. Elle s'exile à Londres en 1958.

Néanmoins, si le succès littéraire arrive facilement, le calvaire n'en est pas fini parce ce Gléber ne supporte pas d'avoir à ses côtés un écrivain féminin plus brillant que lui et il va jusqu'à lui prendre ce qu'elle gagne avec ses livres ! Jusqu'au jour où elle refuse de lui donner, s'enfuit avec ses deux enfants, et demande le divorce.

Edna O'Brien brise toutes les chaînes. Ce qui fera d'elle une sorte de paria mais la rendra célèbre. On dit qu'elle écrit de la pornographie : "Le débat s'élargit alors pour savoir s'il fallait bannir d'Irlande la pornographie hardcore. Je répondis que je n'avais jamais lu de pornographie hardcore ni en Irlande ni en Angleterre."
Les écrivains masculins ne se gênent pas pour la dénigrer : "Interrogé sur mon livre par Jack Lambet, l'écrivain L. P.  Hartley décréta qu'il s'agissait de l'histoire frivole de deux nymphomanes irlandaises." (en parlant des Filles de la campagne). Alors quel scandale quand elle écrit dans un article qu'"il convenait de réécrire les serments du mariage au bénéfice de la femme" !

De nombreuses personnalités du monde artistique et du show biz (comme Paul McCartney) hantent ce livre. Ce n'est peut-être pas la dimension la plus intéressante par moments. Il y a quelques longueurs. Néanmoins on apprécie de voir dépeint les petits défauts de Patrick Kavanagh, qu'on imagine tout sympathique et lisse, mais qui était quand même sacrément barge,  vivant avec des boîtes de sardines dans sa baignoire et un rétroviseur de camion à sa fenêtre !

Quelques chapitres aussi sur les "événements" en Irlande du Nord dans les années 80, et l'absurdité des choses.

J'ai globalement beaucoup appriécié ce livre qui permet de cerner l'oeuvre de l'écrivain qu'est Edna O'Brien autant que l'étau qui enserrait l'Irlande (et continue à serrer les femmes en niant leur droit à disposer de leur corps) . Un ouvrage pétri de poésie et d'ironie, où on a l'impression qu'Edna O'Brien ne se censure (toujours) pas et dit ce qu'elle a a dire. Je dirai qu'il faut peut-être même lire ses mémoires avant de lire ses romans. Je n'en ai lu qu'un (Crépuscule irlandais) que je n'avais pas aimé. Mais depuis, je me suis procurée le fameux Fille de la campagne (presque collector !), La maison du splendide isolement (sur le conflit nord-irlandais) et Tu ne tueras point (sur le droit à l'avortement).

 

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Commentaires
J
Je n'avais pas été emballé par ses nouvelles mais son autobio a l'air bien plus intéressante.
A
Une époque rude avec les femmes.
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