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Mille (et une) lectures

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17 septembre 2014

La porteuse de mots

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Pernelle, 13 ans, est porteuse d'eau dans le Paris de 1499. Son frère, Séraphin, est déchireur de nefs (comprenez qu'il travaille dans une sorte de casse à bateaux dont on récupère les pièces). Pernelle est illettrée, comme tous les enfants du peuple à cette époque. Elle rencontre Enzo, un jeune étudiant italien qui accepte de lui apprendre à lire. Mais si la motivation de Pernelle est sans faille, la vie ne lui fait cependant pas de cadeau : son père meurt des suites de maladie, sa mère est accusée de sorcellerie : une voisine dit qu'elle possède un oeuf de coq et comme chacun le sait (n'est-ce pas ?), ce genre d'oeuf donne naissance à un basilic ! De plus, la pauvre femme a un fils aux yeux vairons, preuve aussi de son origine démoniaque.
Tant bien que mal, Pernelle, tout en cherchant à tirer sa mère de ce mauvais pas grâce à l'aide de Maître Chassanée, apprend à lire. Enzo lui fait rencontrer Erasme, elle devient la protégée du plus illustre éditeur de Paris, Antoine Vérard, qui la charge d'aller à Venise vendre ses livres. C'est le début d'une folle aventure, dans l'atelier de l'érudit imprimeur Aldo Manuzio.

Je dois dire que l'histoire du livre (et par conséquent de l'imprimerie), c'est un de mes dadas. Alors quand on m'a proposé ce roman jeunesse et que j'y ai vu une allusion à l'essor de l'imprimerie, j'ai sauté sur l'occasion !

Anne Pouget plonge le lecteur à l'époque charnière entre la fin du Moyen Age et celui de la Renaissance, celui de la naissance de l'humanisme qui met l'homme au centre du monde et des pensées. L'invention de l'imprimerie par Gutenberg au milieu du XVe siècle contribue à la diffusion du savoir à travers toute l'Europe alors qu'auparavant, les livres étaient recopiés manuellement par des scribes, ce qui prenaient beaucoup de temps. Avec l'invention révolutionnaire de l'imprimerie, les livres et donc les idées, se diffusent rapidement.

En ouvrant ce roman, au regard du titre, je m'attendais à être plongée assez rapidement dans l'univers des imprimeurs, qui à l'époque étaient des érudits. Mais il m'a fallu atteindre la troisième partie du livre (soit lire 135 pages sur 197) pour enfin y arriver. Auparavant, Anne Pouget nous brosse un tableau haut en couleurs du Paris de la fin du Moyen Age, avec ses superstitions qui donnent lieu à des moments cocasses. On apprend qu'à l'époque, on juge les animaux comme les humains et qu'un oeuf, soi-disant de coq, même non éclos, est capable de terroriser une cour de justice toute entière ! L'écrivain évoque également la vie très difficile du peuple de Paris, la maladie qui emporte facilement les gens, le travail des enfants, les constructions pas forcément très solides donnant lieu à des drames. Ce Paris-là contraste avec le faste de Venise la Sérénissime, pôle international de l'élégance et du savoir et donc de l'imprimerie.
C'est avec bonheur que nous rencontrons le fameux érudit italien Aldo Manuzio, considéré comme un génie au même titre que Gutenberg : il souhaitait rendre le savoir accessible au plus grand nombre et avait, à ce titre, le cerveau en pérpétuelle ébullition. Il a inventé le caractère italique qui permit de rendre les textes plus lisibles et de gagner de la place sur la page : le caractère gothique, lourd et difficilement déchiffrable, prédominait jusque-là. Il remit la ponctuation à l'ordre du jour et créa le point-virgule et, enfin, il inventa le livre facilement transportable partout, jusqu'au "petit coin" grâce au format in octavo : le livre de poche, ou il tascabile, comme on l'appela à l'époque. Une réduction du coût de production par là même occasion.

Un roman jeunesse très complet et très documenté sur l'époque, avec de nombreux appels de note et un dossier à la fin de l'ouvrage. Un livre qui comporte parfois un vocabulaire érudit qui pourra peut-être rebuter certains jeunes lecteurs de 12 ans non aguerris. On croise une foule de personnages historiques (Erasme, Barthélémy de Chassanée, Antoine Vérard et, évidemment, Aldo Manuzio au caractère impossible) qui piqueront peut-être la curiosité des jeunes lecteurs par leur implication dans l'histoire de Pernelle et les inciteront à en savoir plus.

Un bon roman, très complet sur l'ambiance d'une époque. Je me suis néanmoins interrogée pendant un long moment sur le rapport entre le titre et le contenu. On le comprend à la fin du roman. C'est un peu dommage, d'autant qu'il n'évoque pas tout à fait l'ensemble du livre.

Je remercie les éditions Casterman pour l'envoi du livre.



 

 

 

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14 septembre 2014

Festival America 2014

 

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Ce week-end s'achève le septième Festival America qui se déroule tous les deux ans à Vincennes. J'y ai mis les pieds pour la première fois, curieuse. Je ne suis pas du tout une spécialiste en matière de romans américains et je n'en lis pas si souvent que ça, surtout depuis que j'ai découvert les Nordiques. Je connais davantage ce qu'on appelle désormais des classiques, comme Steinbeck, (que j'adore), Jack London, Faulkner etc. Dans ma Pile de la rentrée littéraire 2014, j'ai l'énorme pavé qu'est Le Fils de Philipp Meyer. C'est ce bouquin qui m'a décidé à aller au Festival, puisque son auteur est l'un des invités majeurs, aux côté de Joseph Boyden, (dont j'ai aussi le livre depuis un moment) et Richard Ford (même chose).

Le programme du festival est très chargé. Je n'y suis allée qu'une seule journée. J'ai sélectionné deux débats d'une heure trente chacun :

"L'histoire est un roman" qui réunissait Joseph Boyden, Gérard de Cortanze, Boris Fishman, Philippe Meyer et J. Courtney Sullivan

Ce premier débat n'était pas tout à fait à hauteur de mes attentes, un peu "bateau", mais néanmoins, les écrivains ont su le faire rebondir et capter l'attention. J'ai apprécié la dimension humaniste des interventions de Boyden, Meyer et la déclaration finale de Gérard de Cortanze sur la montée de l'intolérance en France. Il a d'ailleurs été chaleureusement applaudi.

J'ai été intriguée par Boris Fishman, écrivain américain d'origine biélorusse, j'ai aimé son humour pour comparer les USA, la France et les Russes dans leur manière de gérer leur Histoire et d'aller de l'avant. Les Américains foncent sans aucune retenue, les Russes reculent et les Français sont précautionneux. Il a mimé la chose, c'était tordant ! Ca m'a donné envie de découvrir son livre, Une vie d'emprunt.
Par contre, je ne pense pas lire un jour du J. Courtnay Sullivan : elle paraissait en retrait du débat. Un roman sur l'histoire du mariage, une idée qui lui est venue lors du débat sur le mariage homosexuel. Elle souhaite montrer qu'à travers le temps, le mariage a évolué. Mais j'avoue qu'un roman là-dessus n'est pas dans mes sujets de prédilection.

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J'ai regretté que deux écrivains (J. Courtnay Sullivan et Philipp Meyer) s'en aillent avant la fin du débat parce qu'ils devaient intervenir dans un autre qui chevauchait celui-ci : c'est moyen, niveau organisation.

Le deuxième débat, "De la violence en Amérique" m'a beaucoup plus enthousiasmée. Un plateau de choix qui réunissait Philipp Meyer, Donald Ray Pollock, Justin Saint Germain, Joyce Maynard et David Vann. J'avais décidé d'y assister en raison de la présence de Philipp Meyer. Mais j'ai découvert qu'il y avait aussi deux autres écrivains formidables : Donald Ray Pollock, dont je connaissais à peine le nom. Devenu écrivain sur le tard, après avoir travaillé 32 ans comme ouvrier dans une usine de pâte à papier, il n'est pas trop apprécié par les politiques dans son pays : il est pour la réglementation du port des armes à feu et il a démontré comment le gouvernement s'est débrouillé pour rendre la chose impossible.

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Lui et Philipp Meyer dialoguaient pour expliquer le pourquoi du mythe de la violence aux USA. Aux Etats-unis, on dit aux gens dès leur enfance qu'ils vivent dans un pays où tout est possible pour chacun d'entre eux, où tout le monde où l'on peut devenir astronaute, président, magistrat, médecin etc. Mais c'est faux (évidemment!). Selon eux, c'est la raison pour laquelle les gens qui échouent, par frustration, retournent en quelque sorte cette violence vers eux-mêmes par le biais de l'arme à feu tout puissante. L'image du mythe John Wayne n'est pas morte, parce que les gens baignent dedans dès leur prime enfance. Le mythe de la police qui est là pour protéger les citoyens est aussi un leurre. C'est du moins l'idée de David Vann chez qui tout est noir de chez noir et sans espoir : au moins lui, je sais que je ne lirai jamais ses livres : je n'aime pas le trop noir-sans-espoir !
J'ai découvert que le mentor de Justin Saint Germain (auteur de Son of Gun, autobiographique) n'est autre que Colm Toibin !
Enfin, l'intervention très enjouée de Joyce Maynard, qui parle français au point d'oublier qu'elle a une interprète, auteur très sympathique et accessible, m'a convaincue d'acheter L'homme de la montagne, tout simplement parce que je me demande ce qu'est la solution de son intrigue, sorte de Stand by me au féminin, qui l'a réveillée en pleine nuit ! L'animateur lui a réservé une question surprenante,  rien que pour elle (on se demande pourquoi) : "êtes-vous pour la peine de mort dans certains cas?" mais il n'a pas eu de réponse si ce n'est : "je suis une femme de gauche". Et bing !

Festival Amercia ce n'est pas que des débats : c'est aussi des projections de film (le matin, j'ai pas pu), un salon du livre où il y avait foule et des libraires sympathiques, légèrement débordés mais toujours prêts à conseiller, des dédicaces d'écrivains jonglant avec les interventions un peu partout

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(oui mais il était à un débat avec Djian à ce moment-là)

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(la littérature indienne n'était pas en reste - ni Québécoise d'ailleurs)

Quelques belles voitures du côté de l'Hôtel de Ville,

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des tipis pour les petits

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des expos photos :

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(les chats les plus américains du monde!)

J'ai dû faire des choix car une journée n'est pas tout à fait assez. Une journée réussie toutefois, avec la perspective de nouvelles lectures potentielles. Mais pour l'instant dans mon sac au retour, juste le dernier roman de Joyce Maynard :

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Un beau voyage outre-Atlantique  le temps d'un week-end. Maintenant, il va falloir attendre 2 ans pour renouveler l'expérience.













 

 

 

 

6 septembre 2014

Quartier sous haute surveillance - Nom de Code : Komiko - tome 3

 

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Allez hop, je vous invite pour la troisième fois à prendre l'avion avec moi, direction Hong Kong pour retrouver la petite bande d'ados hackers, très sensibles à l'injustice du monde moderne et prêts à tout pour débusquer les malfrats de tous poils.

Nous sommes à la fin de l'année scolaire : Lian, Matt, et Mingmei s'apprêtent à affronter les examens et à réfléchir à leur orientation. Lian se demande si finalement, elle est vraiment faite pour intégrer le prestigieux conservatoire de Hong Kong pour lequel elle a pourtant postulé. Elle se verrait plutôt dans le droit international avec une spécialisation sur la défense des droits de l'Homme. Mingmei, toujours aussi "girly", n'a que deux obsessions : le shopping et savoir ce que pense d'elle le beau Matt. Mais elle ignore que ses deux meilleurs amis oeuvrent dans l'ombre, sur une sorte de plateforme web ultra-secrète, contre la corruption et l'injustice qui gangrènent la société. Néanmoins, c'est traînée de force dans une séance de shopping interminable que Lian se retrouve nez à nez avec une camarade de classe en train de faire la manche. Lian va ainsi découvrir la vie difficile de Jade. Autant dire que la semaine de révision avant les examens va être perturbée par cette découverte et que les jeunes hackers vont aller de surprise en surprise.

Après l'exploitation humaine dans toutes ses dimensions  ("Dans la nuit de Hong Kong") et le trafic d'animaux pour produire de faux médicaments ("Le poison du tigre"), le groupe "04/06" est confronté à la spéculation immobilière qui met en péril un quartier populaire de Hong Kong, où les habitants sont sommés de quitter leur logement sous la menace, pas assez indemnisés pour être relogés dans des conditions décentes. Lian découvre un autre monde, juste à une encablure de chez elle : celui de la misère, où les gens vivent entassés à dix dans une pièce sans aucune intimité.
Les ados vont également affronter la langue de bois d'une jeune politicienne charismatique dont le parti dit pourtant vouloir défendre les petites gens. Mais tout est très compliqué à Hong Kong : mieux vaut se méfier. Les mafia locale n'est jamais très loin, jusque dans les conseillers en import-export. Les gens se suicident, c'est très étrange... D'ailleurs, spéculation immobilière et mafia vont ensemble... Alors, même si on a été une rebelle en culotte courte avant d'être politicienne (en ayant organisé une manif contre les menus de la catine), rien n'est simple, ni évident. Lian découvrira qu'entre ce qu'on voudrait faire et ce qu'on peut faire, il y a parfois un gouffre, presque insurmontable. Mais presque, seulement.

Toujours aussi divertissante et addictive cette série ! On a du mal à décrocher avant d'avoir terminé l'histoire. Les jeunes hackers sont aussi des gamins, ce qui donne quelques moments cocasses, surtout quelque fils à retordre à Lian, obligée d'inventer une histoire de rendez-vous galant rocambolesque à cause de son incorrigible copine-commère-obsédée, Mingmei,  avant de se prendre les pieds dans les fils de son histoire imaginaire, qui lui vaudra un drame, au milieu de son enquête très sérieuse sur l'injustice sociale dans une société chinoise corrompue. Le duo Mingmei, (ado jusqu'au bout de son nombril)-Lian (altruiste jusqu'à mettre sa vie en péril)  est comique. Elles sont comme chien et chat mais elles s'entendent aussi comme larrons en foire quand il faut se réconforter l'une l'autre.

Après avoir refermé ce tome 3 je suis allée voir s'il y avait un tome 4 chez Working Partners. Ben non ! La petite bande d'ados et les vadrouilles dans Hong Kong, c'est terminé. Ca va me manquer !

Cette série, dont le premier volume a été primé par le Prix des Mordus du Polar en mai dernier, a l'avantage de sensibiliser les jeunes lecteurs aux problèmes du monde contemporain. Les vampires existent, mais pas forcément comme on les imagine ! Les couvertures de la série sont magnifiques.
Alors, c'est avec un petit pincement au coeur que je referme ce dernier livre.

Je ne peux que vous inviter à commencer la lecture de cette série si ce n'est pas déjà fait !





 

30 août 2014

Pétronille

 

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Contre toute attente j'ai replongé dans la lecture d'Amélie Nothomb dont j'ai lu à peu près tous les romans jusqu'au Fait du prince, qui m'avait déçue. Et c'était avant la création du blog. Depuis, mes lectures se sont beaucoup diversifiées, étendues dans des contrées littéraires qui m'étaient inconnues auparavant.
Je sais qu'Amélie a ses détracteurs qui lui reprochent de sortir aussi régulièrement qu'un métronome et à gros tirage, un livre une fois par an au moment de la rentrée littéraire d'automne. Certains lui reprochent même d'écrire des romans avec pas assez de feuilles ! Mais depuis quand la qualité d'un texte se mesure-t-elle à sa longueur ? Ca me rappelle des histoires de dissert à la fac... Cela dit, je serais presque d'accord pour dire que Pétronille est trop court.
Un conseil : quand vous commencez la lecture, veillez à être en solo et dans un lieu bien insonorisé sous peine de voir débarquer les pompiers ou l'asile. L'entourage peut trouver qu'il vous arrive quelque chose de très étrange - "t'as picolé ou quoi ?"...

Il est effectivement question d'alcool dans ce bouquin. Mais pas n'importe lequel. Celui avec des fines bulles : le champagne. Mais pas un trou-chaussettes : le meilleur du meilleur : veuve-clicquot, Rotschild... En effet "l'ivresse (...) relève de l'art" et le champagne provoque "une ivresse qui ne ressemble à nulle autre" : "Il rend gracieux, à la fois léger et profond, désintéressé" ...

Amélie se prend une cuite toute seule jusqu'au moment où elle se rend compte que le champagne la rend de compagnie tellement sympathique qu'il faut en faire profiter quelqu'un. Elle se met en quête d'un "convignon" ou d'une "convigne" de beuverie. Après avoir passé en revue toutes ses connaissances et décrété qu'aucune ne pouvait convenir, elle décide de le/la trouver parmi ses lectrices et lecteurs au moment tellement bizarroïde de la dédicace qui "repose sur une ambiguïté fondamentale : personne ne sait ce que l'autre veut". Seulement Amélie est réputée répondre à tous les fans qui lui écrivent et donc de connaître ceux avec lesquels elle entretient une correspondance.
Une certaine Pétronille Fanto lui tend son exemplaire du Sabotage amoureux. Amélie sursaute sur son siège : "C'est vous ?!" Du choc de la rencontre qui la fait changer de dimension ("je ne sais même pas si c'est passer de la deuxième à la troisième dimension, parce que c'est peut-être le contraire"), débute une histoire d'amitié farfelue avec cette personne qui semble avoir 15 ans et un "regard de piment rouge" mais qui a 22 ans et termine un master de littérature élisabethaine, (et deviendra à son tour un écrivain connu).

Pétronille est française, de milieu populaire, ses parents sont communistes. C'est un croisement entre Zazie dans le métro et Christopher Marlow (pour reprendre ce que dit elle-même Amélie Nothomb de ce personnage haut en couleur dans une interview présentant son livre). Amélie est belge,  fille de diplomate. Un choc de classes mais un duo de choc, avec un goût pour l'absurde qui donne des moments vraiment truculeusement savoureux.
Si je raconte tout, ça n'a plus aucun intérêt, mais sachez que vous trouverez Vivienne Westwood dans ces pages, pas franchement dans le plus reluisant de sa personnalité. Il y a aussi une histoire de pyjama orange sur fond de vouvoiement, une allergie aux acariens, une virée à ski et une disparition dans le désert. Et du champagne pour accompagner le tout.  A l'image punk destroy de ce roman pétillant à souhait mais aussi tragique.

Amélie Nothomb aborde, entre autres, la difficulté de la vivre de sa plume pour 99% des écrivains en France. Dans le bastion éditorial on dirait encore : "Vous savez bien que dans le monde des lettres, les prolétaires n'ont aucune chance." (sic!). De quoi susciter l'indignation. Mais aussi la jalousie. Le vol. La fin du roman à ce titre-là est surprenante et inattendue. Une mise en abyme en forme de pirouette.

La meilleure cuvée nothombienne que j'ai lue depuis longtemps. Faut pas s'en priver !

















 

 

 

23 août 2014

Sauf quand on les aime

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On se prend le début du roman comme un coup de poing, à travers la violence des propos : "Tu n'es qu'une pute, espèce de macaque, une salope descendue de l'arbre. Et moi je suis le messager de Dieu. File-moi ton 06, file-le moi!". On se demande se qui se passe l'espace de trois secondes , où l'on est, avant de comprendre : dans un train, une femme se fait agresser par un homme.  On pourrait refermer le livre, quitter ce train de l'enfer et retourner à nos occupations comme si de rien n'était. Pourtant, on continue la lecture, outré par le comportement de cet individu, finalement calmé par une passagère plus courageuse que tous les voyageurs du train qui regardent leurs chaussures et ferment leurs oreilles. Le type disparaît du roman .
On descend à Toulouse avec la femme agressée (Tisha) et une des passagères qui n'a pas moufté (Claire). Contre toute attente, Claire propose à Tisha de l'héberger. Claire vit en coloc avec Juliette et Kader.

Peu à peu, les personnages se dévoilent. Ils ont la vingtaine, guère  plus. Juliette est orpheline, ses parents ont eu un accident de voiture fatal. Elle a décidé d'emménager avec ses amis pour fuir la solitude de son studio où "il lui arrivait de s'avachir dans son canapé pour une heure et d'y passer plusieurs jours, se relevant seulement pour aller travailler".  Kader se voyait conseiller en économie familiale mais il est intérimaire sur un chantier, depuis trop longtemps déjà. Claire joue du violon mais n'en vit pas, galère de petits boulots qui lui permettent "à peine de payer sa part de loyer et de courses au Leader". Tisha est barmaid.

Kader en pince pour Juliette qui en pince pour un autre. Claire et Tisha sont ensemble, même si Tisha pense (du moins elle le dit) qu'elle n'appartient à personne. A eux quatre, ils forment une sorte de famille. Ils ont pour voisin un vieil homme qui s'ennuie ferme, emmuré dans sa solitude malgré lui.
La solitude, c'est bien le dénominateur commun de ces personnages. Et la violence sous toutes ses formes, à laquelle ils doivent faire face.
Néanmoins, ce livre regorge d'humour. En particulier les répliques de Tisha, jeune femme "brut de décoffrage" qui ne se censure pas, surtout quand il s'agit de remettre Kader à sa place. Tisha est le personnage que j'ai trouvé le plus attachant des quatre, avec ses grands principes à l'emporte-pièce et sa sensibilité à fleur de peau. C'est sans doute elle la plus solide des quatre. Du moins en apparence.

On se prend des claques dans ce roman et à l'instar des personnages, on n'en sort pas indemne. Heureusement, il y a la solidarité contre l'adversité qui permet de ne pas sombrer et d'avancer.

L'écriture est vive, les répliques font mouche et font rire, le langage moderne, la focalisation multiple. Il s'agit pourtant d'une histoire tragique, mais pas sans espoir. Un roman qui parlera à toutes les générations.

Une belle lecture de la rentrée littéraire.
Vous pouvez également lire les avis de Stephie, et Leiloona, grâce à qui j'ai découvert ce roman.














 

 

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20 août 2014

Sélection rentrée littéraire d'automne

 

607 romans paraissent en cette rentrée, autant dire un choix énorme en perspective. Mais les medias parlent souvent des auteurs "poids lourds", les ultra connus, et il faut fouiller pour trouver les nouvelles pépites de nos chouchoux, dont on parle moins (voire pas du tout), ou dénicher de nouvelles tentations.
Voici mes repérages à ce jour :

 Littérature écossaise
Une vraie belle surprise avec, aux Editions du Rouergue, ce nouveau polar de Peter May, qui promet d'avoir du souffle :

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Présentation éditeur : "Kirsty Cowell a-t-elle poignardé son mari à mort, cette nuit tourmentée sur Entry Island, à l'extrême est du Canada ? Tous le croient, tout l'accable et pourtant Sime Mackenzie, l'enquêteur chargé de l'interroger, ne peut se résoudre à l'accuser. Mais cet étrange sentiment de familiarité qu'il éprouve à son égard n'est-il pas une arme dangereuse offerte à une femme manipulatrice ? À moins que les rêves étranges qui le ramènent à la vie de son aïeul, émigré des Hébrides en terre de Québec au dix-neuvième siècle, ne recèlent une part du mystère ?"

Littérature irlandaise
On est bien gâté, avec trois titres repérés rien que pour cette rentrée d'automne.
Comment ne pas frétiller d'impatience quand je vois deux de mes quatre chouchoux irlandais (Dermot, Sebastian, Roddy et Joseph pour ceux qui l'ignoreraient) ??!!

 

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Présentation éditeur : "Une jeune fille, recluse dans sa chambre, ne connaît le monde qu'à travers sa fenêtre et les paroles de sa mère. Cette dernière lui raconte ses jeux incestueux avec son frère, la vie dans l'Irlande des années 1960, les usines et les salles de bal."

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Présentation éditeur : "L'Irlandais Jack McNulty est un «homme provisoire», tout comme l'ont été ses missions avec l'armée britannique durant la Seconde Guerre mondiale. En 1957, installé à Accra, en proie à l'angoisse et au ressassement, il décide de rédiger l'histoire de sa vie.
Homme ordinaire, aussi héroïque qu'insignifiant, Jack a été le témoin de choses extraordinaires. Il a travaillé et erré à travers le monde, tour à tour soldat, ingénieur, observateur de l'ONU. Son mariage avec Mai, la plus jolie fille de Sligo, est à la fois étrange et tumultueux, mais comme tout le reste, il finira par lui glisser entre les doigts..."

Un John Banville également, même s'il me tente un peu moins que les autres, j'avoue !

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Présentation éditeur : "" Où tout cela va-t-il donc quand nous mourons, tout ce que nous avons été ?
Quand je songe à ceux que nous avons aimés et perdus, je m'identifie à un promeneur errant à la tombée de la nuit dans un parc peuplé de statues sans yeux. L'air autour de moi bruisse d'absences. Je pense aux yeux bruns et humides de Mme Gray et à leurs minuscules éclats dorés. Quand on faisait l'amour, ils viraient de l'ambre à la terre d'ombre puis à une nuance de bronze opaque. "Si on avait de la musique, disait-elle dans la maison Cotter, si on avait de la musique, on pourrait danser.' Elle-même chantait, tout le temps, et toujours faux, "La veuve joyeuse', "L'homme qui fait sauter la banque', "Les roses de Picardie', et un machin sur une alouette, alouette, dont elle ne connaissait pas les paroles et qu'elle ne pouvait que fredonner, complètement faux. Ces choses que nous partagions, celles-là et une myriade d'autres, une myriade, myriade, elles demeurent, mais que deviendront-elles lorsque je serai parti, moi qui suis leur dépositaire, le seul à même de préserver leur mémoire ? "
Qu'est-ce qui sépare la mémoire de l'imagination ? Cette question hante Alex alors qu'il se remémore son premier – peut-être son unique – amour, Mme Gray, la mère de son meilleur ami d'adolescence. Pourquoi ces souvenirs resurgissent-ils maintenant, à cinquante ans de distance, se télescopant avec ceux de la mort de sa fille, Cass, dix ans plus tôt ? Un grand Banville, troublant et sensuel, sur la façon dont les jeux du temps malmènent le coeur humain."

 

Littérature américaine 
Je me laisse porter par l'envie d'aventure américaine et les très bonnes critiques déjà lues dans la presse sur ce bon gros pavé de plus de 600 pages.

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Présentation éditeur : "Roman familial, vaste fresque de l Amérique des années 1850 à nos jours, Le Fils de Philipp Meyer, finaliste du prestigieux Prix Pulitzer 2014, est porté par trois personnages trois générations d une famille texane, les McCullough dont les voix successives tissent et explorent avec brio la part d ombre du rêve américain.
Eli, le patriarche que l on appelle " le Colonel " est enlevé à l âge de onze ans par les Comanches et passera avec eux trois années qui marqueront sa vie. Revenu à la civilisation, il prend part à la conquête de l Ouest avant de s engager dans la guerre de Sécession et de devenir un grand propriétaire terrien et un entrepreneur avisé.
À la fois écrasé par son père et révolté par l ambition dévastatrice de ce tyran autoritaire et cynique, son fils Peter profitera de la révolution mexicaine pour faire un choix qui bouleversera son destin et celui des siens.
Ambitieuse et sans scrupules, Jeanne-Anne, petite-fille de Peter, se retrouve à la tête d une des plus grosses fortunes du pays, prête à parachever l uvre du « Colonel ». Mais comme ceux qui l ont précédée, elle a dû sacrifier beaucoup de choses sur l autel de la fortune. Et comme tous les empires, celui de la famille McCullough est plus fragile qu on ne pourrait le penser.
Porté par un souffle romanesque peu commun, Le Fils est à la fois une réflexion sur la condition humaine et le sens de l'Histoire."

Littérature française
Je suis en train de lire ce roman suite aux éloges unanimes des copines blogueuses (vous pouvez déjà lire l'avis de Leiloona). J'en parlerai donc bientôt...

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Littérature de jeunesse
Enfin parce que la rentrée littéraire, c'est aussi la rentrée littéraire pour les jeunes lecteurs, j'ai repéré deux ouvrages chez Casterman dont les thématiques paraissent intéressantes :
- l'histoire de l'imprimerie à travers les aventures de Pernelle écrites par Anne Pouget

 

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Présentation éditeur : "Paris, 1499. Alors que le royaume de France célèbre l'accession au trône d'un nouveau souverain, Louis XII, la jeune Pernelle, modeste porteuse d'eau, rêve de s'élever au-dessus de sa condition. Fascinée par la lecture et l'écriture, ces savoirs alors en plein essor avec le développement de l'imprimerie et la diffusion des livres, elle se met en tête d'apprendre à lire et écrire, confortée dans ce projet par sa rencontre avec Enzo, un jeune étudiant italien..."

- la rencontre avec un florilège de personnages historiques légendairement infréquentables et présentés par Sophie Lamoureux

 

 

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Présentation éditeur : "Nous sommes tous plus ou moins familiers des grands héros de l'Histoire, mais que dire des autres : les fous, les traitres, les tyrans, les criminels, les dictateurs, massacreurs, salauds et horribles...? Les Légendes Noires nous invitent à rencontrer ces personnages abominables, méprisés, détestés ou violemment controversés, qui ont souvent horrifié leurs contemporains mais n'en ont pas moins joué, en leur temps, un rôle marquant sur le plan historique. Nécessaire, utile et édifiant."

 

 Et puis, n'oubliez pas, en septembre, c'est aussi Festival America à Vincennes ! J'en reparlerai plus tard très certainement !

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 Que la rentrée vous soit douce !

 

 

 

 

 

18 août 2014

Terrienne

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Etienne Virgil, écrivain, prend en stop Anne Collodi, 17 ans. Il la trouve étrange par ses questions directes et très personnelles. Elle lui dit se rendre à Campagne. Etienne la dépose à un croisement. Intrigué, il refait la route dans le sens inverse sans retrouver ledit croisement. Etienne est quelqu'un de rationnel, il croit à peine à ce qu'il écrit dans ses romans, alors dans la réalité...
Anne Collodi cherche sa soeur Gabrielle, disparue mystérieusement il y a un an juste après son mariage avec un type étrange. Gabrielle n'a laissé aucune trace. Pourtant, un jour alors qu'elle écoute NRJ, Anne reçoit un message par ondes radio de sa soeur.
C'est le début d'une folle aventure dans un univers parallèle, immatériel, un autre espace-temps peuplé de gens qui ressemblent aux humains, mais qui justement sont dépourvus d'humanité. Un monde où tout est aseptisé et désincarné. Dans cet ailleurs, on ne respire pas, on vit en apnée perpetuelle ; on ne rit pas, on cliquète. On ne se mouche pas, on ne tousse pas, on n'achète rien. On mange des choses insipides. Un monde sans surprise où tout est programmé et sous contrôle, depuis la conception in-vitro entre deux "compatibles", jusqu'à la mort, par crémation. Un monde où l'on finit par mourir d'ennui et non de maladie. Un monde uniformisé, jusque dans les vêtements. Aucune originalité n'est bien vue. Pour Halloween, on se déguise en Terrien : cet être sale et puant, infesté de microbes et aux moeurs bestiales...

Jean-Claude Mourlevat propose ici un bon gros pavé où l'on ne s'ennuie pas trente secondes : on pénètre avec un mélange d'effroi et de curiosité dans cet univers cauchemardesque. J'ai aimé le clin d'oeil à La Barbe Bleue (annoncé dès le début du roman) : l'héroïne s'appelle Anne et cherche sa soeur prisonnière d'un homme puissant qui se débarrasse des femmes qu'il fait capturer dès quil s'en lasse. J'ai aimé aussi l'allusion à l'auteur de Pinocchio, puisque l'héroïne a pour nom de famille Collodi et fait elle-même référence à la notoriété de son nom. Sans parler du personnage de l'écrivain (dépressif) auteur du Saut de l'ange. Le lecteur, à l'instar de l'héroïne, exécute ce saut, se prend au jeu de la fiction avant de repasser la frontière psychologique qui le sépare du monde réel. Une dose de physique quantique saupoudré d'humour  et le tour est joué.

Vraiment une belle découverte qui convertira les réfractaires à la science fiction les plus aguerris.
Mais attention, la réalité dépasse parfois la (science) fiction ! C'est aussi ce que suggère le roman en filigrane ...

14 août 2014

Un coeur noir

 

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Melkior 17 ans, vient de se faire piquer un scooter qui n'est même pas à lui par une racaille qui a lancé un pavé dans la vitrine d'une pâtisserie. Le scoot appartient à "Tonton", le caïd du quartier. Du moins, le scoot fait partie du "trafic" en tous genres de Tonton. Melkior rêve d'être admiré par Tonton. Mais il le craint aussi. Il décide de cambrioler une maison qui a l'air abandonnée pour rembourser le scoot et briller aux yeux de la petite frappe. Rien ne se passe comme prévu et c'est le début d'une histoire rocambolesque et surréaliste.

Olivier Ka décrit la vie morne d'un ado en quête de lui-même et qui n'a d'autre moyen de se projeter dans l'avenir que par les jeunes qu'il fréquente. Et comme les jeunes qu'il fréquente sont des voyous, évidemment, ça ne peut pas aller très loin. Là dessus, l'auteur plaque une autre réalité : celle d'une drôle de quadragénaire qui vit seul dans la pénombre de sa maison, avec pour unique ami(e), sa chienne Chaussette. La rencontre entre Melkior et celui qui s'appelle François va ouvrir l'horizon du gamin, le distancer de la bande qu'il fréquente et finir par le rapprocher de ses  parents qu'il ne comprend pas. Cette rencontre va lui donner l'espoir. Mais le chemin sera pavé d'embûches.

Le début du roman était prometteur mais je ne vais pas y aller par quatre chemins : je me suis vite lassée et ennuyée de beaucoup de topoï,  de beaucoup trop de pistes ouvertes un peu trop facilement et sans vraiment d'originalité : la quête de soi de l'ado qui passe par la tentation de devenir un voyou ; l'homosexualité ; le qu'en-dira-t-on ; l'accident ; la vengeance (par le meurtre?); la renaissance.

A côté de cela, l'histoire a un côté invraisemblable : on voit mal un inconnu donner tout l'argent qu'il souhaite à un gamin qui vient cambrioler sa maison. On voit mal un gamin mettre une raclée finale à la racaille du quartier jusqu'à le laisser pour mort sur une place publique sans être interpelé par la police. On trouve un peu trop cliché l'ancien agent immobilier devenu une sorte de hippie vivant reclus dans la montagne - et expert en conseils pour ados en mal d'identité... Une maison qui a le don de capter les émotions et fait remonter les souvenirs secrets, une sorte d'Amityville sauce française...

Finalement, cela donne une impression de manque de profondeur, de personnages un peu trop dans le stéréotype que réellement fouillés, le tout dans une ambiance surréaliste. Bref, je suis déçue par ce roman bancal à mon goût. Je ne suis pas trop sûre que les ados accrochent à cette histoire.

 

 

12 août 2014

Nos étoiles contraires

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Hazel Grace Lancaster 16 ans, a un cancer de la thyroïde, diagnostiqué stade 4 et métastasé sur ses poumons. Elle ne peut se déplacer qu'avec des bombonnes à oxygène dans un petit chariot et vit en permanence avec des tuyaux dans le nez. Parce qu'elle ne fréquente plus assidument d'établissement scolaire (elle suit des cours de littérature à l'université), ses deux meilleurs amis sont ses parents et le troisième est un écrivain qui ne connaît même pas son existence. La seule chose qu'elle suit assidument, parce que ses parents l'y obligent, c'est un groupe de soutien aux jeunes malades atteints comme elle de maladie grave. Elle y va en traînant les pieds parce qu'elle trouve ça crétin. Jusqu'au jour où s'y joint un gars à qui il manque une jambe, Augustus. Hazel est intriguée. Débute une amitié, qui ira forcément bien plus loin que ça et d'un livre qui ne peut pas laisser indifférent...
Hazel et Augustus lient amitié grâce aux livres. Hazel a un livre fétiche dans sa jeune vie : Une impériale affliction, écrit par un certain Van Houten, de la même famille que celle du cacao. Ce type n'a écrit que ce livre-là dans sa vie et la fin de son livre est inachevée. Ce qui tracasse Hazel, c'est de savoir ce qui est arrivé à Monsieur Tulipe et à la mère d'Anna. Augustus ne jure que par un roman en plusieurs volumes "où la moyenne [est] d'environ un cadavre par phrase".

Anna est une sorte de double littéraire d'Hazel, du moins Hazel vit à travers elle. Anna connaît un destin tragique. Ce qui adviendra des autres après sa mort est une de ses préoccupations majeures. Raison pour laquelle connaître la suite du roman est presque aussi vital pour elle (pour ne pas dire plus), que le Phalanxifor qui combat son cancer. Elle entraîne Augustus dans sa passion et c'est le début d'un rocambolesque voyage à Amsterdam, apothéose du roman.

On ne peut pas dire qu'on rit beaucoup (contrairement à ce qu'annonce la couverture!), c'est tragique mais sans (trop) de pathos, il y a de l'humour, certes, mais c'est de l'humour cynique qui fait plus sourire que rire. Hazel a elle-même quelque chose d'agaçant parce qu'elle sait toujours tout et est souvent sarcastique. John Green démonte l'image du malade cancereux sans défauts. Les personnages ne se plaignent pas de leur maladie, mais leur attitude révèle leur souffrance et le regard des autres sur eux, qu'ils ne peuvent supporter. Le meilleur copain d'Augustus aveugle et borgne suite à son cancer, s'est fait largué par sa copine qui ne peut supporter de rester avec quelqu'un dont l'avenir est incertain. Cela donne une scène lieu à une scène de violence inouie. Hazel pense être une grenade pour son entourage, celle qui détruira leur vie, ce qui lui est évidemment insupportable.

La violence, c'est aussi ([attention : spoilers! ] celle de la rencontre entre Hazel et son écrivain préféré qui en fait n'est qu'un ignoble personnage, ivrogne, "déception ambulante semi-professionnelle", comme il se décrit lui-même. Il se fiche pas mal de son lectorat. Là aussi, l'image de l'écrivain "nickel" en prend pour son grade ! La violence, c'est aussi celle des anonymes qui se disent des "friends" sur Facebook et qui se complaisent en atermoiements ou en éloges lors du décès d'Augustus alors qu'il aurait eu besoin d'eux avant et qu'ils ne se ont pas donnés la peine de se déplacer. Hazel, qui est la narratrice, remet Van Houten à sa place : pour elle, il n'est "qu'un autre de ces innombrables endeuillés qui ne le connaissaient pas, un autre de ces auteurs de posts qui se lamentaient trop tard sur son mur".

Et puis, évidemment, bien évidemment, ce roman est aussi un roman d'amour entre Hazel et Augustus. J'ai craint le pire à Amsterdam avec la scène à la Maison d'Anne Frank : j'avoue que là, j'ai trouvé ça un peu "too much" (ceux qui ont lu le livre savent de quoi je parle) : j''ai eu très peur de la dimension bluette un peu trop cliché que prenait le livre. Mais on oublie assez vite cet épisode par la consistance de tout le reste. On n'est pas dans un roman à 2 centimes, écrit avec les pieds, pour ados en mal d'histoire à l'eau de rose. Le lecteur en prend pour son compte en ce qui concerne l'émotion.
John Green  traite d'un sujet difficile, celui de la maladie, mais sans tomber non plus dans les clichés du voyeurisme et de l'atermoiement. Mais il ne ménage pas non plus son lecteur. Je pense qu'on se souvient du livre longtemps après l'avoir refermé. Un roman qui ne peut pas laisser indifférent.

Je lis rarement un livre dont tout le monde parle au moment où tout le monde en parle. En général, les blockbusters,  ça me fait fuir. Mais là j'ai fait une exception sans vraiment savoir pourquoi, d'ailleurs, d'autant que les histoires de maladie ne sont pas mon sujet de prédilection a priori. Bonne pioche.







 

7 août 2014

La princesse des glaces

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Erica est écrivain. Un jour, de retour dans son village natal, elle apprend la mort d'Alex, la fille qui l'avait tant impressionnée quand elle était gamine. Elle avait été sa meilleure amie avant qu'Alex rompe tout contact sans explications. Alex a été retrouvée dans sa baignoire, les veines tranchées. Pourtant, personne ne croit au suicide. L'inspecteur Patrick Hedström est chargé de l'enquête. Quelle n'est pas sa surprise de tomber sur Erica au cours de son enquête : c'est la fille dont il était amoureux quand il était ado ! Une dimension qui va s'ajouter aux écheveaux de l'énigme à démêler, et pas qu'un peu !

Les deux personnages sont au point mort dans leur vie sentimentale : Patrick est tout juste divorcé et sans enfant ; Erica vit quasiment recluse chez elle, soumise aux contraintes éditoriales de son prochain roman. Ses parents sont décédés et elle est en discorde avec sa soeur Anna concernant le devenir de la maison familiale. Paradoxalement, le meurtre d'Alex va redonner un sens à la vie de Patrick et d'Erica, tous deux lancés dans une enquête sur le voisinage mais aussi sur eux mêmes.

Cela fait des années que j'entends parler de Camilla Läckberg et de ce polar en particulier. Mais, comme Millenium, je n'arrivais pas à m'y "coller", parce que sans doute on en parlait trop. J'en attendais donc beaucoup, compte tenu des éloges entendues. J'ai bien apprécié le début, avec l'univers de l'écrivain en proie au doute de soi et des contraintes liées à la publication éditoriale :
"Personnellement, elle devait chaque fois faire un énorme effort pour s'installer devant son ordinateur. Pas par paresse, mais à cause d'une terreur profondément ancrée d'avoir perdu sa capacité depuis la dernière fois qu'elle avait écrit."
"Le retard qu'elle avait pris avec son livre la stressait énormément (...) et elle se dit qu'elle allait soulager un peu sa conscience et écrire un moment."
Erica est un personnage très attachant car l'image de l'écrivain est ici complètement démythifiée : c'est une personne comme une autre, même quelqu'un qui doute beaucoup de ses capacités - sauf en matière de cuisine ! De plus, c'est une gaffeuse. Elle empiète allégrement sur les plates-bandes de Patrick et le lui dit sans vraiment prendre conscience des conséquences de ses actes pour l'enquête.
Patrick est un gros nounours amoureux, qui n'arrête pas de se tortiller comme un ver de terre à la moindre émotion. Il n'arrête pas de se faire asticoter par sa collègue à cause de sa relation avec Erica. Les deux tourtereaux tombent en effet rapidement dans les bras l'un de l'autre (enfin, plutôt dans le lit!). Bon, c'était sympa, c'était amusant, mais à force de tirer trop sur la corde sentimentale, Camilla Läckberg en fait une caricature de couple "guimauve" à la limite de la crédibilité. Ce fut ma première déception ! Dommage parce que l'idée du couple écrivain-flic était plutôt amusante !

Concernant l'intrigue à proprement parler, elle est très emberlificotée et il faut aller jusqu'au bout du bout du livre pour avoir une résolution qui finalement laisse un peu perplexe. L'intrigue n'est pas un prétexte à la description de la société suédoise etc. (comme chez l'Islandais Indridasson ou chez Mons Kallentoft, pour citer un autre Suédois) : elle est bien au coeur de la narration et nous fait croiser foule de personnages. Camilla Läckberg revient sur le passé des personnages pour révéler des secrets de famille bien salaces et des ego surdimensionnés. Si l'intrigue m'a tenue en haleine, en fin de compte, je l'ai trouvée peu fouillée. C'est un lavage de linge de famille peu reluisant, mais pas vraiment davantage. Ce fut ma deuxième déception. Rien d'innovant là-dedans.

L'histoire se lit facilement par son style alerte et moderne. Mon oeil a néanmoins heurté une drôle de phrase : "Patrick se tortillait comme un ver de terre sur sa chaise". Je ne sais pas si c'est moi, mais ça prête à confusion... C'est une broutille parce que le texte est bien traduit (= on oublie que le texte qu'on a sous les yeux n'est pas le texte original), mais ça m'a fait sourire !

Bref, une lecture bien partie au début mais qui finalement m'a un peu déçue. J'attendais beaucoup plus d'originalité et d'innovation, depuis le temps que j'entendais parler de ce livre. C'est dommage parce que l'idée de l'héroïne écrivain est vraiment sympa. Je ne me suis pas franchement ennuyée mais j'ai fini par me lasser un peu tout de même. A côté, Mons Kallentoft est beaucoup plus distrayant (et Arnaldur Indridason aussi, pour citer un écrivain islandais).







 

 

 

 

 

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