Philomena
4e de couverture : " Philomena retrace le destin bouleversant d'une mère et de son fils qui, séparés leur vie entière, ont tout fait pour se retrouver.
Lorsqu'elle tombe enceine, en 1951, Philomena Lee n'est qu'une adolescente. Dans l'Irlande d'alors, avoir un enfant hors mariage est un péché. Rejetée par les siens, elle est envoyée au couvent de Rosecrea. Pendant trois ans, Philomena travaille à la blanchisserie et ne peut voir son fils Anthony qu'une heure par jour. Une heure de soleil au milieu du labeur quotidien. Mais le 18 décembre 1955, Anthony Lee lui et enlevé et part avec sa famille adoptive - de riches Américains.
Philomena a malgré tout voué les cinquante années suivantes de son existence à chercher son fils, se heurtant sans cesse au silence de l'Eglise. Elle ignore que, de son côté, celui-ci a entrepris la même quête. Rebaptisé Michael Hess, le garçon est devenu un avocat réputé avant de travailler au sein du Parti républicain sous les administration Reagan et Bush. Il cache des années durant son homosexualité, puis sa séropositivité, à son entourage. Condamné par la maladie, il décide de partir pour l'Irlande, sur les traces de sa mère. Pour se heurter lui aussi au mutisme des religieuses...."
Autant vous dire tout de suite que je vais pousser un coup de gueule parce que le titre de ce livre et la quatrième de couverture sont trompeurs
Tout d'abord le titre : le titre original est The Lost Child of Philomena Lee. Et comme vous le remarquerez ici, l'éditeur français a choisi Philomena, en référence au film de Stephen Frears qui sort ces jours-ci et qui est annoncé sur la couverture.
Ensuite la quatrième de couverture annonce que le livre "retrace le destin bouleversant d'une mère et de son fils qui, séparés leur vie entière ont tout fait pour se retrouver".
Or s'il est bien question de Philomena (et de sa vie chez les soeurs, de la séparation d'avec son enfant etc.) pendant la première partie du livre (soit 108 p.), tout le reste ne parle absolument pas d'elle dans ce pavé de plus de 500 pages, mais de la vie de son fils, reconstituée d'après l'enquête menée par le journaliste britannique Martin Sixsmith, à la demande de la fille de Philomena, Jane Libberton. Il n'est question de Philomena, qu'à la toute fin du livre, de la page 484 à l'épilogue.
Tout ça pour dire que ce que j'ai lu ici, du coup, n'était pas du tout ce à quoi je m'attendais et que c'est de la vie de l'enfant aux Etats-Unis dont il s'agit.
Passons maintenant au contenu à proprement parler. Evidemment, l'histoire d'Anthony Lee (devenu l'Américain Michael Hess suite à son adoption) est touchante, on peut difficilement dire le contraire. Mais j'ai regretté que le récit fasse pas mal dans le pathos et, il faut bien le dire, dans une forme de voyeurisme quant à l'homosexualité de Mike, avec des descriptions sur sa vie intime, puis sa longue agonie des suites du sida.
Par contre, l'ambiance de chasse aux sorcières concernant les homosexuels aux Etats-Unis est bien restituée. Et c'est toute l'ambiance de l'Amérique du milieu des années 50 aux années 90 qui est intéressante, avec le jeu des rouages politiques. De même j'ai apprécié l'aspect documentaire des années 50 en Irlande, l'embarras de Frank Aiken, alors ministre des Affaires étrangères de l'Etat libre d'Irlande sous le gouvernement De Valera, concernant le trafic d'enfants vendus par l'Eglise à de riches Américains, la mainmise de l'Eglise sur l'Etat pour des raisons de gros sous. J'aurais voulu que cela soit approfondi.
Par ailleurs, comme le souligne Judi Dench dans la préface, si ce livre brosse un portrait noir de l'Eglise catholique irlandaise, il ne verse pas non plus dans le manichéisme et montre qu'il y avait quand même des religieux bienveillants, même si trop peu nombreux, qui essayaient de faire de leur mieux à titre individuel. Mais aujourd'hui encore, il est très difficile pour un orphelin irlandais ou pour ses parents d'arriver à se retrouver car, suites aux scandales concernant la vie des filles-mères dans les couvents, les documents compromettants ont été détruits par les religieux. Et, entre les sociétés d'adoption, le comité d'adoption irlandais et le ministère des affaires étrangères, chacun se renvoie la balle...
Enfin, l'écriture elle-même m'a laissée indifférente et je tire une impression globale de maladresse concernant ce livre qui se veut un "document". Le film de Stephen Frears parle sans doute d'autre chose : de l'enquête menée par Martin Sixsmith et Philomena pour retrouver la trace d'Anthony.
Voici, à titre d'info, la couverture de l'ouvrage original de Martin Sixsmith :
Je remercie néanmoins Babelio et les Presses de la Cité pour l'envoi du roman.